SOCIÉTÉ. Plusieurs questions existentielles qui hantent l’être humain depuis toujours sont reliées à la mort et à la religion. Pour faire la lumière sur la vision de la mort dans les grandes religions, Québec Hebdo a demandé à Alain Bouchard, chargé de cours à la Faculté de théologie et de sciences religieuses de l’Université Laval et coordonnateur du Centre de ressources et d’observation de l’innovation religieuse (CROIR), de faire un survol de la question.

Le christianisme
«Le christianisme considère la mort comme un scandale, le fruit des limites de l’homme et de son péché. C’est seulement parce que le Christ a passé à travers la mort et en est ressorti vivant (la résurrection) que l’homme peut à son tour en être libéré. Même quand le chrétien est tenté d’adopter une conception de l’âme spirituelle héritée de Platon, il maintient, contrairement à ce philosophe, que l’immortalité n’est pas naturelle à l’homme et ne peut être qu’un don de Dieu. C’est ce Dieu qui donne à l’être humain le commencement de son existence et celui-ci n’existe qu’aussi longtemps que Dieu veut qu’il existe. Le christianisme n’a jamais été tenté par la croyance en la transmigration, sauf dans quelques courants marginaux.»

L’hindouisme
«L’hindouisme aborde la mort comme une souffrance, et reste une énigme que même les plus grands sages ne parviennent jamais à résoudre entièrement. L’hindou pense que c’est en raison de la lourdeur de son moi grossier et de ses désirs limités et partiels qu’il est amené à s’empêtrer dans le flux des renaissances. Diverses disciplines ou yoga permettent de découvrir le Soi véritable  âtman et de dépasser ces renaissances pour accéder à l’autre rive du voyage, à ce lieu d’où l’on ne renaît plus. La majorité des hindous espèrent par-delà la mort en ce monde-ci une meilleure naissance. Ceux qui savent vraiment ne misent que sur la découverte du Soi véritable, identique au Brahman, et la libération de toutes les existences, bonnes ou mauvaises.»

Le bouddhisme
«Le bouddhisme accepte la conception hindoue de renaissances qui dépendent des conséquences d’actions bonnes ou mauvaises karman, mais va plus loin en s’opposant même à celle d’un Soi spirituel. L’expérience ultime qu’il propose nirvâna dépasse toute conceptualisation. Le véritable bouddhiste doit se vider même de la notion de Soi âtman, y compris de celle d’un Dieu suprême. Le bouddhisme n’est pas un athéisme au sens où l’Ultime, selon lui, n’existerait pas. Le bouddhisme cherche à éteindre en lui toutes formes de désir, sauf celui de la libération, et se réfugie en un silence qui culmine dans une mort qui est expérience de paix et de plénitude.»

Le judaïsme
«Dans le judaïsme, la mort n’est pas monstrueuse, elle fait partie intégrante de l’expérience humaine; elle est acceptée comme naturelle et voulue par Dieu. La mort n’est pas la fin de la vie, si le corps revient à la poussière, l’âme retourne à son Créateur. Religion de l’ici et maintenant, l’au-delà occupe peu de place dans le judaïsme. Cette sobriété entourant la mort témoigne de l’espérance en une vie future qui s’inscrit dans la vie ici-bas. Les enseignements parlent d’une résurrection qui doit intervenir à la fin des temps inaugurée par la venue du messie promis. La mort n’est donc qu’une étape transitoire de la vie, l’âme allant rejoindre les âmes des ancêtres.»

L’islam
«Pour l’islam, Dieu est la source et la destination de toute chose. L’homme est sur terre pour adorer son Créateur en se mettant à son service en faisant le bien, il doit prouver qu’il mérite de retourner à Dieu après sa mort. La mort n’est pas une punition, c’est le destin inévitable de tous les êtres humains, elle est une étape transitoire menant à une autre vie, après la résurrection et le jugement dernier. L’étape la plus importante de ce jugement est la pesée des actes sur une balance, chacun se verra attribuer la récompense ou la punition méritée selon ses actes. Une fois ses péchés expiés, le croyant pourra profiter d’une vie éternelle en présence de Dieu.​»